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"... la psychothérapie la plus élémentaire, mais aussi la plus directe et évidente, est celle que le médecin engage, ou devrait engager systématiquement, lorsqu'un patient est en face de lui, quelle que soit son affection, son âge et les circonstances."
Médecin et député français Bernard Accoyer
(Journal Français de Psychiatrie, 12, 2001 (1), p.5)

...CONTINUONS LE COMBAT ! (Politique 3)

Toutes les fausses "médecines", les pseudo-sciences, toutes les pratiques (ce ne sont pas des savoirs mais plutôt des recettes de grimoires!) plus ou moins ésotériques de saltimbanques aux prétentions faussement scientifiques, qui décrètent, sans la moindre preuve valable, aussi bien préserver des maladies mentales que restaurer la "santé mentale", doivent être dénoncées et exposées pour ce qu'elles sont: de mauvais trompe-la faim ou pire: des attrape-nigauds plus profitables aux praticiens qu'à leurs clients.

Les hommes et femmes politiques de chez nous qui disent règlementer ces pratiques et donner un statut officiel (une reconnaissance officielle) à ceux qui les dispensent, cèdent aux pressions de certains lobbies et obéissent à une démagogie facile. Ils laissent ainsi transparaître leur infinie crédulité (leur absence de rationalité, leur superbe méconnaissance, voire leur mépris de tout esprit critique) autant que leur ignorance (et/ou celle de leurs conseillers "scientifiques"). Si le XVIIIème siècle a été appelé celui des lumières, veut-on, au XXIème, retourner à l'obscurantisme et à la magie exploitant la jobardise?

Mais il y a plus grave encore: ces politiques profitent du pouvoir dont nous les avons (provisoirement!) investis pour décerner un certificat officiel et définitif de respectabilité et de validité à certaines pratiques surtout fantasmatiques, alors que le pouvoir politique ne possède pas en soi - ou automatiquement - le savoir requis, et alors qu'il ne prend pas non plus de précaution sérieuse pour s'entourer des compétences indispensables afin d'en juger valablement.
Et ce n'est pas tout. En agissant de la sorte, on lâche systématiquement la proie pour l'ombre. Mises à mal en faveur de simulacres, les maigres ressources des citoyens sont dilapidées, dans lesquelles puiser pour un jour trouver et promouvoir les vraies solutions. Ces ressources ne sont peut-être pas perdues pour tout le monde, mais elles le sont certainement pour le progrès de nos connaissances véritables et pour les malades mentaux chroniques dont nos "responsables", depuis toujours, semblent se soucier comme d'une guigne.

Nos gouvernants semblent avoir imaginé que légiférer pour règlementer la "psychologie clinique" et les "psychothérapies" (v. politique 1) - et pour en "reconnaître" les praticiens - constituerait le témoignage (donnerait la preuve) de leur souci bienveillant de la "santé mentale". Sans doute pensaient-ils aussi répondre aux revendications de plus en plus pressantes de nos nombreuses associations de psys (psychologues et "thérapeutes" de divers "courants") devenues fort encombrées en à peu près deux décennies. Ils pensaient peut-être du même coup "moderniser" la "santé mentale" à moindres frais.
Amateurs se croyant éclairés mais en réalité peu avertis, peu prudents et impatients (pressés par les impératifs des échéances politiques), ils ne se doutaient vraisemblablement pas des difficultés, aussi bien de principes que techniques, dans lesquelles ils n'ont pas hésité à foncer tête baissée (les "réformes" de 1988-1990 et les tristes effets des lois dites "Busquin" ne semblent pas leur avoir inspiré de réflexions salutaires).

L'incompréhension et une certaine naïveté de nos ministres se dévoilent au grand jour dans cette phrase de l'exposé des motifs du projet de loi modifiant l'A.R. n° 78 du 10 novembre 1967: "Grâce à un règlement légal, le patient a une garantie quant à la qualité et le praticien est reconnu dans la société."
Nous avons déjà rappelé ailleurs (v. politique 1) qu'à l'évidence, décerner de beaux diplômes, voire attribuer de clinquantes médailles (de quoi surtout décorer les murs d'une salle d'attente ou une vitrine) à un praticien quel qu'il soit et de quelque pratique que ce soit, ne peut jamais rien garantir quant à la qualité du contenu de sa pratique. Il faut aussi que ce contenu satisfasse à un certain nombre de critères fort stricts, c.à.d. que sa validité se base sur des preuves scientifiques, c.à.d. des données scientifiquement établies et reconnues. Et là, il se trouve qu'on est, bien souvent, fort loin du compte.
Il semblerait que les ministres et leurs conseillers ne paraissent pas - ou ne parviennent pas à - comprendre la nature de ces preuves ni les caractéristiques auxquelles elles doivent répondre. Comme beaucoup de personnes, ils sont impressionnés par l'actuelle ubiquité de "la science" dans tous les domaines de notre vie quotidienne, par l'importance et le prestige considérables qu'elle a acquis dans notre société occidentale moderne. Mais ils ne distinguent pas entre sciences véritables et les pratiques intuitives plus ou moins fantaisistes et magiques. Certaines d'entre elles s'affublent d'un jargon pseudo-scientifique visant à les déguiser en science pour emprunter à cette dernière et usurper, à moindre coût et à moindre effort, un peu de cette reconnaissance officielle, de ce "crédit" et de ce prestige tant recherchés.

Et, faute de volonté de clarté (ou manque de lucidité, ou ignorance, ou encore manque de courage devant les pressions?) dans les définitions et dans les textes, voilà les difficultés qui commencent. En effet, à peine les ministres ont-ils (il/elle) commencé à faire promulguer leurs lois et à rédiger hâtivement (devrait-on dire: bâcler?) d'autres projets de loi, aussitôt ces projets suscitent un tollé, une levée de boucliers dans les associations professionnelles de psychologues et psychothérapeutes dont les dirigeants poussent des cris d'orfraie à la perspective, entre autres calamités annoncées, que leurs membres soient "inféodés" aux médecins et, ainsi, perdraient leur autonomie, leur "liberté de diagnostic, d'indication et de traitement", perdraient leur "identité professionnelle".

Et il y a fort à parier que les difficultés et les remous, provoqués par nos ministres et par les réactions des psys à leurs décisions politiques, risquent de s'amplifier encore car, ne l'auriez-vous pas remarqué? les médecins, quant à eux, se sont jusqu'à présent cantonnés dans un silence discret et prudent. Cela risque de ne pas durer. Il n'est guère besoin d'être devin pour prédire de prochaines nouvelles péripéties, polémiques et autres disputes. Leurs causes et origines véritables devraient être évidentes s'il n'y avait autant de personnes, de tous bords, intéressées à les dissimuler pour de multiples raisons (dont les bonnes sont souvent difficiles à avouer). On peut dire qu'animés d'intentions que certainement ils croyaient bonnes, nos ministres ont néanmoins commis un fameux pas de clerc dont ils ne mesurent apparemment pas le moins du monde les multiples conséquences qui surgiront bientôt.

Cette bataille de la "santé mentale", peut-être peu préméditée car sans doute redoutée et sans cesse reportée, qui finalement s'annonce, il y a déjà longtemps qu'elle aurait dû avoir lieu. De multiples acteurs devraient y prendre part, c.à.d. les politiques, les médecins (neuro-psychiatres mais aussi généralistes et neurologues), les psychologues dits "cliniciens", les psychothérapeutes de toutes "obédiences" ou "courants". De ce débat qui peut-être va s'ouvrir, la clarté pourrait jaillir, la vérité devrait enfin éclater. Soyons optimistes et, une fois n'est pas coutume, remercions les ministres pour leur maladresse, même si nous voulons la croire involontaire; elle a l'avantage de nous laisser espérer que les usagers, c.à.d. les premiers et véritables intéressés, finiront par en retirer un bénéfice depuis longtemps attendu: d'une part, que les véritables malades mentaux chroniques reçoivent enfin, des praticiens compétents, l'attention, les soins médicaux ET l'aide psychologique qu'ils méritent; d'autre part, que les personnes qui, malgré leurs difficultés du moment, peuvent cependant se contenter de la seule assistance psychologique non médicale, ne soient plus considérées (déconsidérées!) comme des malades, comme les patients à "mauvaise santé mentale" pour lesquels on essaye de les faire passer actuellement.

La vérité trop longtemps occultée qui devrait éclater, nous croyons, contrairement à ce qu'affirme le proverbe, qu'elle est toujours bonne à dire et doit toujours être dite, quoiqu'elle ne soit pas toujours agréable à entendre par tous ceux qu'elle concerne. Une fois de plus, revenons-y, même si les autres articles de ce site y ont déjà, clairement, fait allusion à de nombreuses reprises.

Sur ce site, on n'a cessé de répéter qu'il ne faut pas confondre "souffrances existentielles" et affections mentales, qu'il ne faut pas faire passer pour des troubles mentaux véritables (des pathologies) les "malaises psychologiques", les difficultés de société, les "problèmes existentiels", le "mal-[de]-vivre", le "mal-être" . Pourtant, c'est justement cette confusion que tous indistinctement s'obstinent à créer et à entretenir depuis toujours, qu'ils se disent "thérapeutes", qu'ils soient psychiatres médecins, qu'ils s'appellent "psys" de quelque "tendance" que ce soit, parfois même se mêlant à eux des sociologues académiques sans doute en mal (et en quête) de notoriété facile.

Tous, en effet, ont adopté la détestable habitude de regrouper ces manifestations "psychologiques" ou "psychiques" ou "mentales" au sein d'une seule et même entité indéfinissable et floue nommée, par une sorte d'antiphrase particulièrement pernicieuse, à la fois révélatrice et génératrice de confusion mentale généralisée, la "SANTÉ MENTALE". Et, se voulant sans "complexes", ils s'en proclament les experts et s'en disputent sinon le monopole, au moins la part la plus importante et la plus avantageuse possible pour eux-mêmes, un peu à la manière de charognards sur les dépouilles d'un champ de bataille (pour ceux qui seraient choqués par la métaphore, rappelons leur, si besoin en était, qu'il est question d'un secteur d'activité de notre société qui, globalement et littéralement ne vit essentiellement que du malheur des gens, et qu'on nous demande de croire ses responsables sur parole - jamais sur pièces! - quand ils en vantent les bienfaits et l'efficacité, alors qu'en même temps, ô paradoxe passé pudiquement sous silence! tous nous en disent cependant que "la demande augmente considérablement" (R.T.B.F.: Santé: pas de "psy" sans docteur?", 26/02/2002).

Madame la Ministre Aelvoet, après une première mouture de son projet de règlementation du statut et de la pratique du "psychologue clinicien", s'est aperçue que ces praticiens n'ont pas la formation, c'est-à-dire les compétences médicales requises pour exclure l'existence possible d'une véritable pathologie médicale chez ceux qui viendraient les consulter. Ceci présentait des dangers évidents que nous avions d'ailleurs déjà signalés (v. politique 1). Dans une version ultérieure de son projet, optant pour la prudence, elle a donc subordonné, mais de manière peu nuancée, les consultations et thérapies chez les psys à l'accord préalable du médecin. C'était, en apparence, la sagesse. C'était cependant encore insuffisant. Dans le domaine de la santé des gens, Madame la Ministre a eu l'occasion d'en faire l'expérience au gouvernement, on n'est jamais trop prudent, on n'est jamais assez prévoyant (rappelons-nous les exemples récents des problèmes d'E.S.B. et des contaminations de la volaille par la dioxine).
Pour renforcer la sécurité des clients suivis par des psys désormais "autonomes", il fallait encore responsabiliser ces derniers. Quoi de plus normal et d'ailleurs obligé, que d'assumer la responsabilité des actes qu'on pose, ou du défaut des actes qu'on devrait poser dans le cadre d'un contrat tacite de service?
Il était donc naturel et logique d'imposer aux psys l'obligation d'adresser leurs clients au médecin en cas de suspicion de pathologie (ce que la ministre appelle les causes "biomédicales" [sic!]), pathologie éventuellement présente non seulement dès le départ, mais aussi qui pourrait survenir en cours de "thérapie". C'est ce que Mme la ministre a fait figurer dans le projet de loi, mais apparemment sans tenir compte du fait que la formation des psys ne leur donne pas les moyens d'assumer correctement cette responsabilité.

La distinction entre ce que la ministre appelle des "troubles psychiques" comportant des causes "biomédicales" (les pathologies, de la compétence des seuls médecins) et ce qu'elle nomme des "problèmes psychiques" n'en comportant pas (le non pathologique, dont les psys pourront se charger seuls) est, paraît-il, quasiment impossible à établir aux yeux des psychologues (R.T.B.F., 26/02/2002, Ibid.). Si ce n'est là un aveu, spontané quoique sans doute involontaire d'impuissance, voire d'incompétence des psychanalystes et thérapeutes protestataires, qu'on nous propose donc une autre interprétation plus plausible!
De plus, il semblerait que "la nécessité d'un diagnostic médical, prévue par le projet de loi, pourrait aussi avoir comme conséquence de pousser les psychologues à envoyer systématiquement leur clientèle chez le médecin, de quoi se prémunir contre tout risque de voir le patient se retourner contre son psychologue et l'attaquer en justice, réflexe protecteur que l'on observe déjà aux Etats-Unis" (R.T.B.F., ibid).
Cette "nécessité", les psychanalystes la refusent. Pourtant, l'absence de diagnostic médical, contrairement à ce qu'ils semblent croire, ne les protège nullement de l'éventualité de la présence, chez leurs "patients", de pathologies ne relevant pas des "thérapies" qu'ils pratiquent. Leur "sainte ignorance" (ce que, précisément, ils appellent la distinction impossible à leurs yeux!) ne les protègerait alors pas non plus d'éventuelles actions en justice, bien au contraire! Croient-ils donc éluder leurs responsabilités, simplement en niant - parce qu'ils les ignorent (délibérément ou naïvement, qu'importe!) - des risques bien réels que, de leur propre aveu, ils ne peuvent pourtant identifier? Comment aussi qualifier l'attitude de "professionnels" qui revendiquent d'exercer seuls des responsabilités mais s'avouent incapables de les assumer ainsi que leurs conséquences, et qui refusent même de minimiser les risques (d'abord encourus par qui?), refusant de répartir peut-être mieux les responsabilités entre intervenants en fonction de leurs compétences officiellement reconnues (ou, si l'on doit en croire les prétentions, voire les accusations des uns comme des autres, leurs parts respectives d'incompétences objectives, avouées ou non)?

Pauvres "clients" ou "patients" dont les "décideurs politiques" ont l'inconscience (ou le culot?) et surtout l'indécence de prétendre qu'ils auront une "garantie de qualité", d'affirmer qu'ils seront désormais "mieux protégés", de suggérer qu'on va enfin cesser de les mener en bateau parce que l'équipage de ce bateau aurait obtenu de beaux uniformes dessinés par des stylistes ayant l'aval ou la faveur des ministres!

Les problèmes des véritables malades mentaux, parents pauvres de toujours de notre si beau système [de santé], proviennent pour une bonne partie de ce nom de "SANTÉ MENTALE", une fable, un mirage tout à la fois absurde, fantôme inexistant mais incontournable, bien pratique pour certains qui en vivent et s'en servent, peu utile ou même néfaste pour ceux qui doivent y vivre, ceux à qui on peut en imposer tous les caprices, toutes les humeurs. Ceux-là doivent subir, ce sont les poissons d'espèces diverses peuplant le vivier de la "SANTÉ MENTALE". Les poissons sont les "clients" des uns ou des autres, les "patients" de tous, leur "matière première".

La fable de "SANTÉ MENTALE" que nous allons conter maintenant, c'est la concrétisation cauchemardesque d'un délire flou, imaginaire, théorique, dogmatique et fabriqué de toutes pièces à partir de fantasmes jamais dissipés qui s'élaborent et ne cessent de s'amonceler au fil du temps. C'est un univers devenu administratif, ayant donné finalement naissance à une institution bureaucratisée, une administration en soi, un monde à part à la Kafka.
Confortablement assis autour du vivier qu'à la fois ils alimentent (repeuplent) constamment et qu'ils exploitent (à la manière de ces chasseurs qui se disent, bien sûr, protecteurs de la faune), qu'ils soient professionnels ou pêcheurs du dimanche ayant le permis, nos pêcheurs psys de la fable sont collègues et/ou concurrents, qui s'opposent et s'entre-déchirent, quoiqu'en douceur, plus ou moins sournoisement. On compte parmi eux des pêcheurs psys appelés psychiatres, porteurs d'un diplôme de médecin spécialiste, et de nombreux pêcheurs psys qu'on pourraitt appeler psys "parallèles" ou "alternatifs" désormais "reconnus" (les actuels et plus bruyants protestataires contre les projets ministériels).
Malgré les multiples schismes qui les divisent en clubs de pêche psy ou "chapelles", tous parviennent cependant à s'accorder pour préserver cette fiction qu'est la "SANTÉ MENTALE". Elle est en effet leur pêche réservée (chasse gardée?) commune, leur fonds de commerce à partager, leur raison sociale, la vitrine qui justifie une majorité des leurs, c'est l'alibi accréditant leur utilité sociale et assurant leur survie matérielle.
Quant à la population des poissons nageant dans le vivier de la fable, elle est très hétérogène, mais on peut toutefois en répartir les individus en deux grandes catégories distinctes: d'une part ceux qui devraient effectivement se trouver là (ceux qui souffrent d'une pathologie), d'autre part ceux qui s'y sont égarés par erreur - ou qu'on y a attirés - (et qui n'ont pas de pathologie!)
Une partie des pêcheurs psys affirment qu'entre ces deux catégories de poissons (dans le vivier parce qu'il faut les soigner, ou inversement), les uns sans doute vraiment malades, les autres peut-être pas vraiment, la distinction, quoique toujours délicate, ne leur est pas impossible. Ils disent que leur formation médicale les en rend capables mais, avec quelque raison d'ailleurs, ils contestent cette capacité à ceux qui n'ont pas reçu leur formation.
Les autres pêcheurs psys affirment, au contraire, que cette distinction n'a pas de sens puisqu'ils sont incapables de la faire (tous les poissons seraient à la fois malades et non malades).
Ces pêcheurs psys-là, par contre, contestent aux premiers, aux pêcheurs médecins (et psychiatres) les compétences requises pour appâter efficacement les poissons, compétences qui ne seraient acquises qu'après de longues formations tout à fait spécifiques que seuls certains psys reçoivent.

Quoi qu'il en soit, quel est l'enjeu de cette fable, de cette querelle? C'est, pour chaque pêcheur, et pour pouvoir continuer son activité, d'être à même de revendiquer le nombre le plus élevé possible de poissons "guéris" qu'on serait capable de rejeter, non plus dans le vivier, mais dans la rivière, enfin!
Et, pour tous les pêcheurs psys quels qu'ils soient, voilà un but bien plus facilement atteint avec des poissons pas vraiment malades (dépourvus de pathologie) qu'avec des poissons réellement atteints (souffrant d'une pathologie). C'est pourquoi ils veulent laisser tous les poissons, malades ou non, indistinctement dans le même vivier. C'est pourquoi certains ne veulent pas pouvoir distinguer entre pathologique et non pathologique. Ainsi, dans leur grande majorité, les pêcheurs pourront se vanter de soigner efficacement un grand nombre de poissons, en les faisant tous passer pour de vrais malades. Les nombreux échecs pourront ainsi être tus et ignorés, opportunément noyés dans la masse des fausses réussites qu'on présente comme étant les plus nombreuses, sinon les seules (c'est ça, noyer le poisson?)

Il faut mettre fin à cette fable. Cessons donc, enfin! de parler de "SANTÉ MENTALE". De nombreux "psychothérapeutes" de diverses tendances clament depuis longtemps et sur tous les toits qu'il faut "démédicaliser la santé mentale", et que les médecins n'ayant pas de formation psy (sauf, disent-ils avec quelque condescendance, certains psychiatres), ils prescriraient, à tort et à travers, des médications psychotropes plus nocives que bénéfiques, alors que les psychothérapies (les leurs, de préférence!) seraient plus indiquées.
Prenons les au mot! Supprimons la "SANTÉ MENTALE" et remplaçons-la par deux organismes ou institutions (comme on voudra) qui seraient, d'une part, les "AFFECTIONS MENTALES" ou "MALADIES MENTALES", et d'autre part l' "ASSISTANCE PSYCHOLOGIQUE".

Les maladies ou "pathologies" mentales seraient, au départ, de la compétence des médecins, tandis que l'assistance psychologique n'aurait plus pour officielle vocation première de "guérir" mais de soutenir psychologiquement et de parfois aider à obtenir le renforcement d'un traitement médical ou encore, d'aider à le supporter. L'assistance psychologique serait donc de la compétence incontestée des "psys", médecins ou non. On ne voit pas pourquoi une personne ne se sentant pas malade mais éprouvant le besoin d'un soutien psychologique, ne pourrait s'adresser directement à un psy si elle le souhaitait, sans devoir d'abord faire appel à un médecin.
Les "pathologies" mentales, quant à elles, ont toujours une base biologique et organique, personne, aujourd'hui, ne peut plus l'ignorer. Quoi que proclament sur leur site Internet des ministres sans doute mal instruits par des conseillers mal choisis, ces affections-là ne se soignent pas essentiellement par la parole. Elles sont toujours et obligatoirement justiciables de traitements médicamenteux. Raison supplémentaire pour en laisser la responsabilité aux seuls médecins, mieux à même de prescrire la médication, dans la mesure toutefois où la pratique prépondérante de techniques "psychologiques" n'a pas fait oublier à certains leur formation biologique médicale initiale.
On veut croire que le monopole médical des prescriptions médicamenteuses ne devrait pas poser de problèmes à nos psys s'ils veulent rester cohérents avec eux-mêmes, puisqu'ils se récrient généralement contre l'usage de psychotropes. (Signalons cependant que, dans certains pays (p.ex. l'Etat du Nouveau Mexique, U.S.A.), les psys revendiquent le droit de prescrire des médicaments, et des velléités de légiférer dans ce sens se manifestent actuellement. Mais, très logiquement, le droit à prescrire ne sera envisagé dans cet état qu'après que les connaissances correspondantes, théoriques et pratiques, en neurosciences et en neuropharmacologie auront été acquises et sanctionnées par un diplôme reconnu et agréé.)
L'art de guérir - ce que maintenant certains, chez nous, appellent "l'art médical" - étant ainsi devenu bien distinct de l'assistance psychologique, les plates-bandes des uns ne devraient plus craindre les piétinements des autres, ce qui devrait encourager médecins et psys à collaborer, peut-être mieux que par le passé.

Le réaménagement de la "SANTÉ MENTALE" en "ASSISTANCE PSYCHOLOGIQUE" et en "AFFECTIONS MENTALES" aurait aussi pour conséquence d'enfin ne plus permettre d'ignorer et délaisser les malades mentaux psychotiques et chroniques véritables, aujourd'hui noyés parmi les autres. Il deviendrait enfin possible de rechercher pour eux de vraies solutions (et de les mettre en oeuvre!).
On se donnerait ainsi les moyens d'afficher un bilan enfin plus réaliste et crédible des résultats objectifs des efforts déployés par les professionnels de l'actuelle "santé mentale". Ce bilan objectif n'existe pas à l'heure actuelle, nous ne disposons que de messages publicitaires peu crédibles de certains, et du silence des autres.


Première publication: 5 Avril 2002 (J.D.) Dernière modification: 9 Mai 2007

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