The Insanity Offense

THE INSANITY OFFENSE par E. Fuller Torrey

How America's Failure to Treat the Seriously Mentally Ill Endangers its Citizens

W.W. Norton & Company New York - London 2008. ISBN 978-393-06658-6

Le Dr E. Fuller Torrey nous clame non pas une simple dénonciation, mais un impitoyable réquisitoire contre les politiques de santé mentale qui se sont succédé aux U.S.A. et dont il brosse à grands traits l'historique. Il démontre sans la moindre ambiguïté comment la conjonction de la désinstitutionnalisation (se voulant bienveillante!) et de la défense idéologique d'une certaine conception (dite libertaire!) des "Droits de l'Homme" et de la "Liberté de la personne", sans toutefois les accompagner des moyens matériels ni humains indispensables à leur mise en oeuvre effective, a conduit à un désastre humain, médical et social qui s'est répandu dans un grand nombre des états des U.S.A.

L'absence de traitement adéquat de nombreux malades résultant soit de l'impossibilité juridique de les hospitaliser et traiter malgré eux, soit de l'absence de suivi psychiatrique et thérapeutique obligatoire, a eu des conséquences qui étaient prévisibles mais que, par idéologie et "opportunisme économique", peu de responsables politiques ont voulu reconnaître: le chômage, la misère et l'exclusion sociale, la clochardisation massive, la comorbidité accrue, la multiplication des violences intra-familiales, une recrudescence de la petite délinquance, la discrimination sociale et la stigmatisation des malades assimilés en bloc à des criminels, la répression judiciaire et les incarcérations de femmes et d'enfants malades, les cas spectaculaires (mais bien plus rares que la presse ne le fait croire) de crimes de sang montés en épingle et généralisés abusivement à l'ensemble des malades, etc., etc: sous prétexte de "liberté", une paradoxale dérive toute "sécuritaire" et surtout répressive s'est fait jour, nous ramenant à des habitudes d'ancien régime qu'on croyait abolies: les internements carcéraux à répétition aggravant la maladie à défaut de la soigner.

De notre côté de l'Atlantique, le constat du Dr Fuller Torrey devrait très sérieusement nous mettre en garde contre cette tentation de privilégier le tout sécuritaire et le tout répressif au détriment des soins aux malades et au détriment de leur traitement. Cette tentation de notre société est entretenue par l'ignorance des politiques sur ce que sont les maladies mentales chroniques, elle croit se justifier par une rentabilité financière immédiate mais illusoire qu'elle préfère à un effort de solidarité humaine élémentaire qu'elle semble vouloir oublier malgré tous les beaux discours dont cette solidarité est le prétexte.


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