Q10 - Les neuroleptiques permettent-ils aux malades de mener une vie pratiquement normale?

C'est ce que j'ai lu sur un site français d'Internet consacré à la santé. Pourtant, mon frère, qui depuis plus de 10 ans, est soigné par des neuroleptiques, a dû arrêter ses études et n'a pu les reprendre. Il n'est pas non plus capable d'une activité professionnelle suivie, qu'elle soit rétribuée ou même bénévole. Quoique le neuroleptique qu'il prend actuellement améliore son état, on ne peut pas dire qu'il mène une vie normale. Est-ce parce qu'il ne recevrait pas le "bon" neuroleptique?

S'il vous donne l'impression d'avoir un effet favorable, n'en changez pas!
La sévérité des troubles schizophréniques, mais aussi l'efficacité de tel ou tel neuroleptique sur les signes et symptômes varient considérablement d'un malade à l'autre. Les affirmations générales sur un pareil sujet sont donc, forcément, toujours partiellement fausses.

Ce sont surtout les symptômes "positifs" qui, avant l'avènement des neuroleptiques, obligeaient à enfermer les malades, à les attacher, ou même éventuellement à les immobiliser (contention par "camisole de force"), à leur faire subir des "traitements" prétendant les "calmer", (douches glacées, etc.) mais visant surtout à les épuiser physiquement pour pouvoir les "gérer".

Une proportion importante de malades schizophrènes sont significativement aidés par les traitements neuroleptiques: ce sont surtout leurs symptômes "positifs" qui peuvent être atténués, plus ou moins bien, par ces médicaments. Les neuroleptiques ont ainsi permis de renoncer aux traitements barbares qui, faute d'autres thérapeutiques, étaient de mise avant les années 1950. Ils ont aussi permis de désencombrer les hôpitaux et instituts psychiatriques en envoyant "ailleurs" les malades ayant recouvré une partie suffisante de leur autonomie.

Les neuroleptiques ne sont pourtant pas également efficaces chez tous. Ils n'agissent pas sur l'anosognosie. Ils n'améliorent les fonctions cognitives que partiellement, de manière indirecte. Même les neuroleptiques les plus récents n'ont d'effets que controversés sur les signes "négatifs". Ceci signifie qu'une proportion importante de malades n'auront pas d'autonomie, ou une autonomie seulement partielle, et auront besoin aussi d'une assistance sinon continue, du moins périodiquement renouvelée et plus ou moins importante.
Ceux qui se permettent d'appeler cela "mener une vie pratiquement normale" n'ont manifestement jamais eu à la mener eux-mêmes. S'ils essayaient, leur discours changerait peut-être.


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