Revendication 2 - LA FIN DE LA DISCRIMINATION DES MALADES

Les familles de malades mentaux réclament pour leurs malades et elles-mêmes que soit mis définitivement un terme à l'inadmissible discrimination actuelle entre malades "somatiques" et malades "psychiatriques".

Cette discrimination refuse fort souvent aux malades que leur soient communiqués

Alors qu'on sait que les soins, l'encadrement, la prise en charge matérielle (financière, sociale, etc.) de ces malades chroniques de fort longue durée (souvent à vie) devront être assumés très majoritairement par leurs familles

> ces dernières sont tenues à l'écart de l'information médicale concernant leur malade

> dès lors, leurs tâches de soignants permanents et la défense des intérêts essentiels et élémentaires, tant matériels et physiques que psychologiques et moraux de leurs malades sont rendues impossibles aux familles alors que, du fait même de la maladie, les malades ne peuvent compter que sur ces mêmes familles pour assurer leur défense.

(Un exemple de cette situation absurde est donné ci-après, mais de nombreux autres auraient pu être choisis)

Un exemple de discrimination inexplicable et injustifiable:

Si un de nos proches, ayant atteint l'âge de la majorité, est, par exemple, renversé par une voiture et amené ensuite inconscient (ou seulement confus) à la garde d'un hôpital, et si on constate alors qu'il doit subir une intervention chirurgicale:

1) On nous demande, à nous, l'accompagnateur de l'accidenté, notre autorisation (celle du mari pour son épouse, celle de l'épouse pour le mari, etc.) pour procéder à cette opération, en nous expliquant la nature de l'opération et en justifiant sa nécessité. Puisque le patient lui-même, quoique majeur, n'est pas en état de donner son "consentement éclairé", on demande en général ce consentement à la première personne disponible (celle qui accompagne le patient) qui accepte de tenir le rôle de parent "responsable".

2) Si nous avons des doutes sur la capacité du chirurgien local de mener à bien l'intervention, ou si nous nous rendons compte que, pour l'une ou l'autre raison, l'hôpital ou la clinique où notre proche a été amené ne dispose pas, soit des infrastructures, soit du personnel médical ou paramédical indispensables pour procéder à l'opération dans des conditions satisfaisantes,

nous pouvons:

1) appeler en consultation un expert extérieur, qui pourra donner son opinion sur l'opportunité d'opérer sur place;

2) refuser notre autorisation et exiger le transfert dans une autre unité chirurgicale;

3) une fois l'opération faite, si nous avons l'impression que le traitement post-opératoire est mal conduit, nous pouvons faire appel à un consultant extérieur qui pourra discuter du traitement et de l'état du malade avec les médecins locaux.

Tout ce qui précède n'est ni hypothétique, ni invraisemblable, ni même rare. Quoique le patient soit majeur, on considère qu'il n'est pas capable de donner son "consentement éclairé". On le demande par conséquent au plus proche parent disponible, voire à la personne accompagnatrice qui accepte d'en tenir lieu.

Ainsi peuvent se passer les choses en cas d'accident ou de maladie "somatique", c'est-à-dire "corporelle" ou "physique".

Par contre, dans les cas d'affection mentale:

En cas d'hospitalisation contrainte dans un service de psychiatrie (pour mise en observation ou pour traitement), la famille ou des tiers font appel, soit au Procureur du Roi, soit au juge de Paix, parce qu'ils doivent contraindre le malade à l'hospitalisation pour se faire traiter. La justification de la nécessité de l'hospitalisation est donnée dans un rapport médical circonstancié remis au magistrat qui prend la décision.

Dans cette manière de procéder, on admet implicitement l'incapacité du patient, même majeur, à donner son "consentement éclairé" à l'hospitalisation et au traitement. Pourtant, même si la requête d'hospitalisation en service psychiatrique avait été introduite par un membre de la famille, ni ce dernier ni, a fortiori, aucun autre membre de la famille n'aura dès lors plus aucun droit de regard sur le sort de son parent malade. Aucune des possibilités évoquées plus haut à propos de l'accidenté sur la voie publique ne sera cette fois concédée, sous prétexte que, le patient étant majeur, des parents ou d'autres membres de la famille n'ont pas à prendre des décisions à sa place. Le "secret médical" étant invoqué, on ira même jusqu'à tenir la famille dans l'ignorance de l'état de santé du malade et dans l'ignorance de sa situation administrative et légale. L'incohérence de ces attitudes est encore soulignée par le fait que c'est pourtant à la famille qu'on demande de prendre à sa charge les frais financiers de l'hospitalisation, du traitement et des éventuels honoraires d'avocats, sans autres explications, alors qu'on refuse à cette famille le droit à la parole et à l'information la plus élémentaire.

Quand l'hospitalisation sous contrainte a été demandée par des tiers, il arrive que la famille n'en soit même pas informée. Inquiète du sort de son malade, elle avertit alors les services de police et de gendarmerie de la "disparition inquiétante" de cette personne. Des semaines peuvent se passer avant qu'elle n'apprenne, par le détour d'une note de frais ou d'honoraires d'avocat, que le malade est hospitalisé en section psychiatrique "fermée". (ceci n'est pas de la fiction!)

Dans les services hospitaliers où se traitent les "affections somatiques", on semble admettre avec un certain bon sens l'évidence que, parfois, les meilleurs moyens de soins ne soient pas disponibles, que des erreurs humaines, même si elles sont heureusement fort rares, puissent survenir et, surtout, la famille et les proches, aidés du médecin traitant, ont la possibilité de faire corriger les dysfonctionnements éventuels.

Mais les services psychiatriques, quant à eux, sont-ils donc tous, au contraire des précédents, de tels centres d'excellence que de pareils dysfonctionnements soient inimaginables et d'avance exclus, au point d'exclure aussi toutes possibilités d'information et de recours? Les psychiatres de ces services sont-ils donc tous, soit des prix Nobel méconnus et, à la manière des anciens papes et de certains ayatollahs plus récents, omniscients, à la fois tout-puissants, infaillibles et responsables seulement devant Dieu?

D'où les services psychiatriques et leur "officiants" tirent-ils donc cette perfection unique, indiscutable, enviable et inaccessible aux autres services hospitaliers? Pourquoi cette question, pourtant évidente, n'est-elle jamais posée? Craint-on que la réponse ne soit gênante?

POURQUOI DONC MAINTENIR CETTE DISCRIMINATION ABSURDE ET INJUSTE ENTRE LE MALADE "SOMATIQUE" ET LE MALADE "PSYCHIATRIQUE"?


Menu Articles