Chap. VII-2
Note 3

On préfère ne pas parler des malades schizophrènes.

On omet aussi de reconnaître que les malades psychotiques, et surtout les schizophrènes, sont bien plus mal lotis encore que les autres catégories défavorisées de notre société. En effet, c'est justement leur maladie qui leur ôte la capacité de revendiquer efficacement leurs droits, qui les empêche d'utilement faire entendre leur voix, à la différence d'autres catégories qui parviennent à se regrouper et à se faire reconnaître et entendre des pouvoirs publics.

Les familles de malades, les seules véritablement motivées par les problèmes de la maladie mentale parce qu'elles les vivent jour après jour, tentent de revendiquer pour eux, mais elles sont déjà épuisées et souvent usées par la lutte directe contre la maladie d'un des leurs. Leurs efforts "politiques" et leurs moyens financiers sont dérisoires face à l'immensité de la tâche.

Quant à nos "professionnels", ils ne croisent les malades psychotiques chroniques que dans le cadre de leur profession: dans les "institutions", et pendant les heures de bureau. Devenus une espèce de fonctionnaires de la "santé mentale", beaucoup d'entre eux semblent parfaitement satisfaits des conditions de l'exercice de leur profession; ils s'inquiètent peu de la situation de leurs clients dont ils ne partagent et n'imaginent donc pas la vie: pour beaucoup, les psychotiques ne sont qu'une justification, une part de raison sociale, voire un prétexte de la psychiatrie, ils ne sont plus une de ses raisons d'être. Les entend-on jamais élever la voix en faveur de leurs patients?

Conséquence: "Il n'y a rien à signaler" sur le front de la maladie mentale. Ou même: "cela existe-t-il vraiment?"


RETOUR

Menu Articles