Mis en ligne le
16 janvier 2004 sous l'intitulé
Psychanalyse:
thérapeutique ou religion?

en réaction aux articles
parus le 9 janvier 2004 dans
La Libre Belgique: (a) et (b)
"Réglementer la
psychothérapie?"
par Y. Depelsenaire
"La psychanalyse française
en danger de mort?
Mobilisation"

par B. Delattre

30. a) "[...] la psychanalyse n'est en rien une pratique médicale, [...]"
"[...] vous n'entendrez jamais aucun médecin ni aucun psychologue, entretenant à la clinique un rapport éthiquement authentique (sic), considérer sa formation universitaire comme une garantie suffisante de sa pratique psychothérapeutique."
b) "la réforme [...] excluera de ce métier tous les "laïques" du freudisme".

Les projets ministériels belges de règlementation de l'exercice des "psychothérapies" (dont "les psychothérapies par la parole"), qui avaient été avancés, notamment par la ministre Magda Aelvoet, semblaient avoir été mis "en veilleuse" depuis que Mme la ministre avait quitté le gouvernement fédéral. Toutefois, ce sujet fait actuellement débat en France, si bien que nos psychanalystes belges se saisissent de l'occasion pour protester à nouveau contre le spectre menaçant de la "subordination" annoncée des psychothérapeutes aux docteurs en médecine.
Nous avons ici une illustration supplémentaire, tout d'abord du double langage des héritiers de Freud, et ensuite de ce que c'est, pour eux, qu'être psychanalyste.
Si certains psychanalystes avouent aujourd'hui que "la psychanalyse n'est en rien une pratique médicale", par contre le fondateur et pape de ce "mouvement", Sigmund Freud lui-même auquel ils se réfèrent encore toujours et en permanence, disait bien dans ses "leçons": "Je dois toutefois supposer que vous savez que la psychanalyse est un procédé de traitement médical de personnes atteintes de maladies nerveuses." (Introduction à la psychanalyse, 1916-1917, Trad. S. Jankélévitch, Payot 1962) (bien avant Mr Depelsenaire et bien mieux que lui, Molière, déjà, faisait dire au Sganarelle du 'Médecin malgré lui' qui plaçait le coeur à droite et le foie à gauche: "Oui, cela était autrefois ainsi; mais nous avons changé tout cela").
Certains psychanalystes ne risquent pas l'apnée, qui invoquent un "rapport à la clinique authentiquement éthique" (!!) alors que même leurs grands coryphées n'ont pas précisément donné l'exemple convainquant de pareil souci d'éthique, et envers leurs propres patients cette fois, et on sait que la "guérison" de leurs patients souvent leur importait moins que le nombre des "consultations" et la durée de la "psychothérapie".
De surcroît, ne parler que d'une"garantie suffisante de sa pratique psychothérapeutique", c'est tromper grossièrement son monde. Aucune formation, qu'elle soit universitaire ou autre, ne peut jamais offrir de "garantie suffisante" de quelque pratique que ce soit. Pourquoi donc ne parle-t-on pas plutôt des conditions nécessaires pour que des "garanties suffisantes" soient possibles? Et suffisant à quoi?

Ainsi, entre autres et multiples exemples possibles, n'importe quel magicien de music-hall, n'importe quel illuminé à la langue bien pendue (pour ne pas dire un gourou, un charlatan ou un escroc) peut suggérer, à tort mais avec beaucoup d'apparente autorité, que les indispositions, gênes, voire douleurs prémenstruelles que certaines femmes peuvent parfois ressentir sont liées au cycle lunaire, et en tirer de prétendues recettes thérapeutiques aux "garanties" fournies par d'imaginaires "sélénites", c'est-à-dire tout sauf "suffisantes" pour soulager les maux de ses patientes. Et ces "garanties" ne seront pas plus présentes si le "psychothérapeute" est astronaute et peut se vanter d'avoir, lui-même, un jour marché sur la lune!
Par contre, si le "thérapeute" a obtenu un diplôme de docteur en médecine décerné par une université reconnue, ce diplôme atteste bien - et de manière vérifiable par tous [il "garantit"] - que l'enseignement dispensé par cette université comporte des cours d'anatomie humaine, d'embryologie, de physiologie, d'endocrinologie, etc., fournissant à ses élèves les connaissances de base préalablement indispensables au traitement efficace des troubles de ses patientes. Ces connaissances-là, ce n'est pas sur la lune qu'on obtient la garantie de pouvoir les acquérir, ni en assistant à des cours de philosophie ou de philologie!

Dans toutes les "formations", les "garanties suffisantes" ne peuvent jamais porter que sur l'enseignement dispensé, pas sur ce que les enseignés en feront. C'est pourquoi il y a de bons médecins, et d'autres qui le sont moins. Cela vaut aussi pour les plombiers et les pianistes, etc.,...

La psychanalyse n'est effectivement pas un acte médical. C'est une mystagogie, un "parcours" qui se veut "initiatique", un recueil de rituels auxquels certains veulent prêter des vertus magiques. Elle est la négation de tout ce qui fait la vraie fierté de l'Homme: son intelligence et sa rationalité, son sentiment et son besoin d'appartenir à une seule espèce: l'humanité. La psychanalyse ne respecte pas l'intégrité de la personne de ses patients, ce respect pourtant devrait être à la base de l'éthique de tout thérapeute. Qu'ils ne parlent donc pas d'éthique de la psychanalyse; les psychothérapeutes freudiens se l'inventent au gré des circonstances et de leurs propres besoins.

La psychanalyse, par nature et comme toutes les "religions", ne peut se soumettre à aucune évaluation critique rationnelle. Par conséquent aussi, elle ne peut "soigner" aucune maladie. Même si elle prétend le contraire, elle ne peut apporter aucune "garantie suffisante" de quoi que ce soit: ni sur "l'enseignement" qu'elle prétend inculquer, et encore moins sur ce que les adeptes en feront.
On désigne une partie de ceux qui croient à la psychanalyse du nom de "laïques", ce qui sous-entend nécessairement qu'il y en a aussi d'autres, qui sont des "initiés". Et puis, il y a tous les "profanes".
Comme ces appellations le suggèrent, et comme, de plus, il est basé sur le dogme, le freudisme se voulait au départ une nouvelle religion bien plus qu'une véritable thérapie des maladies mentales. La plupart des religions qui s'affichent comme telles promettent le salut des ames, leur immortalité et la sérénité dans un autre monde.
La psychanalyse et le freudisme ont tout d'abord prétendu soigner et guérir, ici-bas et maintenant, les "désordres de l'âme", mais ces prétentions jamais vérifiées (auxquelles aujourd'hui les adeptes eux-mêmes hésitent à renoncer ouvertement) ne parviennent pas à masquer les intentions véritables du mouvement: servir les intérêts de ses maîtres et leur asservir les croyants qu'ils appellent commodément "patients" pour s'en assurer la clientèle (voyez aussi le livre de Jacques Bénesteau renseigné à notre rubrique "Livres").

Que ceux qui voient "la psychanalyse [française] en danger de mort" se rassurent: la psychanalyse ne risque pas grand-chose aujourd'hui. Le succès des médiums, voyants extra-lucides, diseuses de bonne aventure et autres cartomanciennes, gourous et autres marabouts ne se dément pas, l'abondance des petites annonces des dernières pages de nos journaux en atteste à suffisance.
Comme l'a dit A.K. Dewdney: "The fact that we have no working theories will make little difference to the psychiatric profession as a whole for the simple reason that we will always seek help when confronted by the terrifying unknown. On the day when some non conscious process makes its presence felt, suddenly surfacing in the form of paranoia, obsession, panic, paralysis, or even hallucinations, we would seek help even from psychics." (A.K. Dewdney: "Yes, we have no neutrons - An Eye-Opening Tour through the Twists and Turns of Bad Science", p. 61. Wiley & Sons, Inc., New York 1997, ISBN 0-471-29586-8)
("Le fait que nous n'ayons pas d'hypothèses de travail ne fera globalement guère de différence pour la profession de psychiatre, pour la simple raison que nous rechercherons toujours de l'aide quand nous serons face à la terreur de l'inconnu. Le jour où un quelconque processus inconscient se ferait sentir, surgissant soudain sous la forme de paranoïa, d'obsessions, de panique, de paralysie, ou même d'hallucinations, nous rechercherions de l'aide même auprès de médiums.")


Mis en ligne le
22 mars 2004 sous l'intitulé
L'amour entre hérissons?
Avec des précautions!
en réaction au
communiqué de presse

du Centre démocrate Humaniste
daté du 27 février 2004, intitulé
"Relation des suicides
par les médias"

31. "Cette Charte a trois objectifs:

Il s'agit de la "Charte de communication sur les pathologies mentales" que les stratèges et penseurs du CDH (notre parti du "Centre Démocrate Humaniste") proposent aux médias d'adopter dans "le cadre d'une politique publique de santé mentale" Prenons d'abord le risque de tenter de traduire ce texte en français à peu près correct et compréhensible. (Selon le "Petit Robert", l' "acceptabilité" est un terme didactique de linguistique qui désigne le caractère d'une phrase acceptable pour la syntaxe et pour le sens [correcte et signifiante]).
Nous pencherions donc plutôt pour l'interprétation suivante du "premier objectif": "rendre plus acceptables les pathologies mentales", elle nous paraît la plus plausible.
Cependant, aussitôt, une difficulté surgit: d'un point de vue sémantique, cet objectif ressemble désormais à une reddition suite à la défaite! En effet, rendre les pathologies mentales plus acceptables, n'est-ce pas en quelque sorte déjà les accepter, s'y résigner? Est-ce cela qu'on nous propose? Mais, qu'on y songe, parle-t-on, par exemple, d'accepter le cancer, la tuberculose ou le SIDA, faudrait-il s'y résigner sans les combattre? Alors, pourquoi accepter les "pathologies mentales"?
Il nous faut donc, probablement, encore nuancer notre interprétation. Peut-être les technocrates de la communication du CDH ont-ils voulu dire qu'il voulaient "rendre les malades mentaux plus acceptables" (mais comment? En leur imposant le port de la cravate en société?), ce que, quand même, en bons "communicateurs", ils auraient pu s'efforcer d'enrober d'une "approche" plus respectueuse de leur prochain défavorisé (plus humaine sinon "humaniste") en disant simplement et en bon français, cette fois, que "nous devrions nous efforcer de mieux accepter les malades mentaux parmi nous". Là, nous pourrions peut-être les approuver, mais si c'est bien là ce qu'ils avaient l'intention de nous dire, pour quelle raison - d'obscure politique? - fallait-il employer pour cela une terminologie hermétique d'oracle grec antique? Mystère, en effet... (autre mystère: les bons apôtres du CDH ne se demandent pas si les malades mentaux accepteraient, eux, de s'insérer parmi nous, où aucun espace de société acceptable à leurs yeux n'est prévu à leur intention).

Le deuxième objectif serait d' "en finir avec la stigmatisation de la maladie mentale". J'ai déjà rappelé à plusieurs reprises sur ce site que prétendre qu'une maladie serait stigmatisée n'est qu'une absurdité. On ne stigmatise pas une maladie, on ne stigmatise pas des événements indépendants de la volonté humaine, on ne stigmatise pas la nature. Certains peuvent dire qu'ils stigmatisent, par exemple la guerre, événement résultant de la stupidité de l'homme. Il serait cependant plus juste de dire qu'ils stigmatisent les fauteurs de guerre, les responsables. Nos donneurs de conseils, experts CDH en communication auraient eux-mêmes pu dire qu'il faudrait "en finir avec la discrimination des malades mentaux". Mais on s'aperçoit alors que ce "deuxième objectif" n'est que la répétition fidèle du premier, et que la "Charte" proposée se réduit en fait à deux objectifs (ce qui pourrait paraître un peu maigre à certains).

Le "troisième objectif", (en réalité le second et dernier), n'est que l'appel adressé aux médias, pour qu'ils fassent preuve de prudence quand ils relatent les cas de suicide et les tentatives de suicide, car les penseurs du CDH s'imaginent que le récit qu'on en ferait pourraît avoir un "effet incitatif" (sic). Même si cette supposition était vérifiée - ce qu'elle n'est pas! - nos donneurs de conseils du CDH se gardent bien de dire en quoi, concrètement, la "prudence" du discours des médias pourraît consister. Sans doute les médias devraient-ils, dans l'esprit des stratèges du CDH, transposer aux journalistes rapportant des suicides, le comportement des hérissons faisant l'amour... )


Mis en ligne le 5 avril 2004 sous l'intitulé
Psychiatrie ou liturgie catholique?
en réaction à l'article paru le 2 avril 2004
dans La Dernière Heure, intitulé
"Dépression souvent mal soignée" par J. M.

32. "dans sept cas sur dix, [...] la prise en charge n'aboutit pas à la rémission, c'est-à-dire la guérison complète."

C'est ce qu'on apprend à la lecture d'un articulet intitulé "Dépression souvent mal soignée".
Le journaliste n'aurait-il pas confondu prise en charge psychiatrique avec confession catholique et rémission de ses péchés, guérison complète avec absolution? Nous savons que les psys sont nos nouveaux prêtres, mais de là à supposer qu'ils distribuent des hosties en guise de neuroleptiques, ou que les prêtres fassent l'inverse...


Mis en ligne le 19 avril 2004
sous l'intitulé
Cause à ma tête,
(le bas de) mon dos est fatigué
en réaction aux articles parus
le 24 mars 2004
dans La Libre Belgique (Belga)
et le 7 avril 2004
dans Le Généraliste ( N° 685 , p.20)
"Entre les deux oreilles"
par Jan Vanderveene

33. "Le mal de dos a une origine psychologique dans 90 pc des cas".
"L'immense majorité des patients présentent des lombalgies aspécifiques sans aucune explication biomédicale. Il faut donc sans doute en chercher la cause plutôt entre les oreilles qu'entre les vertèbres..."

C'est ce que concluent - avec beaucoup d'assurance - les journalistes ayant été informés du contenu de la "thèse de doctorat" d'une psychologue de l'université de Gand. Celle-ci affirme pourtant que "Le médecin doit assurer à ses patients qu'aucun signe de maladie sérieuse n'a été trouvé, que la lombalgie n'est pas un symptôme de maladie grave mais bien un signe d'un manque de condition du dos." (nous soulignons).
S'agirait-il donc d'un nouveau syndrome psychosomatique, la "psycholombagie inconditionnelle"? Cette affection serait-elle de la compétence d'une nouvelle spécialité qu'on devrait appeler la psych(o-o)to-méso-thérapie rachidienne?
En réalité, où est l'erreur? L'erreur est de croire que, parce qu'on n'est actuellement pas encore capable de trouver "l'explication biomédicale" à un symptôme, il faille nécessairement lui inventer une "explication psychologique" arbitraire. Ce besoin d'explication, malgré l'ignorance légitime qu'on se refuse à avouer, c'est lui qui est à l'origine, par exemple de la psychanalyse et de la médecine psychosomatique: quand le médecin ne sait pas ce que vous avez, "c'est sûrement psy".


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